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Thirault, Eric;
Léa, Vanessa;
Lepère, Cédric;
Vannieuwenhuyse, Dorcas
Un nouveau « très grand site » du IVe millénaire dans le Sud de la France : l’apport du chantier « Cazan l’Héritière 2008 » à Vernègues (Bouches-du-Rhône)
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- Media type: E-Article
- Title: Un nouveau « très grand site » du IVe millénaire dans le Sud de la France : l’apport du chantier « Cazan l’Héritière 2008 » à Vernègues (Bouches-du-Rhône)
- Contributor: Thirault, Eric; Léa, Vanessa; Lepère, Cédric; Vannieuwenhuyse, Dorcas
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Published:
PERSEE Program, 2016
- Published in: Bulletin de la Société préhistorique française, 113 (2016) 3, Seite 523-570
- Language: French
- DOI: 10.3406/bspf.2016.14652
- ISSN: 0249-7638
- Keywords: Archeology ; Archeology
- Origination:
- Footnote:
- Description: Les sites néolithiques de plein-air sont encore mal connus en Provence. Cette situation contraste avec la moyenne vallée du Rhône, le Languedoc et la moyenne vallée de la Garonne où nombre de grands sites chasséens des Ve et IVe millénaires BC sont documentés depuis des décennies. Sur la commune de Vernègues, la multiplication des interventions préventives (diagnostics et fouilles) depuis vingt ans a permis de documenter, de manière partielle, une vaste occupation du Néolithique moyen et final. Elle s’étend au moins sur 160 hectares au fond et sur les rebords d’un vallon abrité dans les collines qui jouxtent, en rive gauche (sud), la vallée de la Durance. Nous proposons d’appeler «Cazan » cette implantation eu égard au hameau qui en occupe le centre. Sa position géographique, entre les collines des Alpilles à l’ouest, la plaine de la Crau au sud-ouest, la vallée de la Durance au nord et le bassin d’Aix-en-Provence au sud-est, ainsi que sa vaste superficie, laissent penser que ce site pourrait jouer un rôle central dans l’organisation des territoires chasséens de la Provence occidentale. Le site de Cazan est actuellement documenté par vingt-trois points de découverte, dont quatre fouilles planimétriques ; le tout représente environ 2,7 hectares d’occupation mis au jour. La densité des vestiges est inégale, mais la faible superficie réellement fouillée (moins de 2 % de la totalité du site) ne permet pas une approche globale de cette vaste occupation. Tout au plus peut-on dire que ce type de site très extensif est rare dans le Sud de la France. Dans cet article, nous présentons les données issues de l’une des campagnes de fouille, au lieu-dit «l’Héritière » en 2008. Il s’agit d’une opération préventive qui a duré quatre semaines et qui a permis d’explorer une surface de 5 600 m2. Les données recueillies ont permis de répondre à plusieurs questions qui se posent à propos de ces très grands sites : durée et nature des occupations, chronologie fine et fonctions. L’étude géomorphologique a permis de comprendre l’insertion des vestiges de l’occupation chasséenne dans une séquence stratigraphique complexe, avec, en particulier, une légère dépression héritée des temps glaciaires dans laquelle on retrouve la plus grande densité de vestiges. La topographie actuelle en pente douce et les variations latérales de la séquence sédimentaire observées en coupe démontrent que les couches naturelles et archéologiques sont préservées de manière différentielle, certaines zones ayant subi plus d’érosion que d’autres. À l’inverse, certaines zones offrent un plus grand développement sédimentaire où les vestiges et le mobilier ont été piégés et sont mieux conservés. Les structures avérées, au nombre de trente-cinq, comprennent quinze fosses de stockage, deux ou trois puits à eau, un dépôt de mobilier, trois empierrements chauffés, huit à dix fosses de combustion, deux foyers à plat ainsi qu’un probable calage de poteau. Les fosses sont de volume moyen et, sauf exception, ont un comblement rapide et non anthropisé. Les deux puits à eau présentent des comblements stratifiés et ont servi de lieu de rejet de mobiliers et de restes organiques divers. De ce fait, chacun de ces deux puits présente une séquence stratigraphique riche en informations sur la nature des occupations. Les fosses de combustion ont livré les preuves de combustion sur les parois et le fond, mais ont probablement subi des remaniements, car les pierres qui les comblent partiellement ne sont pas toujours en position primaire. Les deux foyers et le calage de poteau témoignent d’activités qui n’ont laissé que très peu de traces au sol. L’étude des productions céramiques a permis de mettre en évidence quatre ensembles morphologiques interprétés comme autant de phases d’occupation. Le traitement des données technologiques montre, pour chacun de ces groupes, l’utilisation de matières premières locales et une certaine diversité des chaînes opératoires. Cette dernière pourrait signaler l’existence de plusieurs unités de production domestique employant des façons de faire différentes. Les quatre phases isolées sur le site s’intègrent sans difficulté à la sériation régionale des productions céramiques. Toutefois, les productions céramiques de ces quatre phases conservent certaines spécificités tant morphologiques que techniques que l’on pourrait proposer d’interpréter en terme de style local. L’assemblage lithique, composée d’une petite série de 745 éléments, montre que le site de Vernègues est intégré à différents réseaux de diffusion de matières premières exogènes (obsidienne de Sardaigne, silex bédoulien vauclusien, silex oligocène de type Apt-Forcalquier). L’analyse typotechnologique met en évidence la présence de deux phases chronologiques dont une (la plus ancienne) n’est documentée que par du mobilier épars. La phase récente du Chasséen, est quant à elle, abondamment représentée, sans qu’il soit néanmoins possible d’y distinguer plusieurs étapes. Le croisement des données fournies par la stratigraphie, la sériation céramique et par les sept dates 14C permet de proposer l’existence de quatre phases d’occupation : une phase «Chasséen ancien », antérieure à 4000 BC, attestée par du mobilier épars et une date radiocarbone discordante avec le mobilier associé ; deux phases du Chasséen de type «Terres Longues » et «Rocalibert » (étapes C et D1 de la sériation céramique régionale) : creusement puis comblement des puits, accompagnés de fosses pour l’une des phases, la datation la plus probable est comprise entre 3950 et 3790 BC, soit une durée maximale d’un siècle et demi environ ; une ultime phase, Chasséen de type «Pertus » (étape D2), avec les fosses à combustion, dans une fourchette comprise entre 3790 et 3690 BC, soit une durée maximale d’un siècle environ. La répartition spatiale des vestiges ne montre aucune polarité spécifique à l’une des phases d’occupation. Autrement dit, à l’échelle de la fenêtre de la fouille 2008, nous avons affaire, sur trois siècles, à des occupations réitérées et extensives dans l’espace, qui ne laissent, pour chacune d’entre elles, que peu de vestiges au sol. Ce résultat suggère un modèle d’occupation peu intense, mais une appropriation réelle des lieux. Il sera nécessaire, par la suite, de confronter cette proposition avec les autres secteurs fouillés sur ce vaste site. La finesse chronométrique obtenue sur ce chantier permet aussi d’envisager une étude précise des modalités de subsistance et d’approvisionnement en ressources et leur évolution au cours du Chasséen, travail actuellement en cours.
- Access State: Open Access