Description:
Bien des inepties déparent les biographies dues à Diogène Laërce. Comme le révèle l'analyse de la Vie d'Aristote, une grande partie d'entre elles s'expliquent par l'application maladroite d'un procédé de composition assez singulier : d'un thème normalement amené par la marche du récit chronologique, l'auteur passe volontiers, par associations d'idées, à un thème voisin ; de celui-ci, il saute à un autre, et ainsi de suite. Des digressions en cascades se mêlent donc à la narration biostraphique. On peut retrouver, cependant, la charpente originelle de la biographie : il suffit d'isoler les digressions et de ne considérer que les morceaux qui les ont déclenchées. Or ce démontage de la Vie d'Aristote révèle un fait d'une importance primordiale : le canevas, sur lequel a brodé Diogène est identique à celui qu'on retrouve chez le grand Apollodore , l'un et l'autre découlent d'une source commune, qui est probablement le péripatéticien Ariston de Céos. Diogène a fait de son mieux pour étoffer ce donné primitif en y insérant une foule de renseignements complémentaires ; il a rédigé lui-même une partie de ces digressions et a laissé à l'état brut les matériaux qu'il destinait aux autres. Son manuscrit, à demi achevé et bourré de notes additionnelles non encore incorporées au texte, a été confié à un éditeur, qui a transcrit le tout en un texte continu, non sans commettre une foule de bévues et d'erreurs. La stupidité d'un rédacteur incapable est ainsi venue s'ajouter à l'insigne naïveté de Diogène.